C’est ce parcours audacieux que propose Biliana K. Voden Aboutaam, entre passé prestigieux et technologies les plus pointues de notre temps. Fidèle à elle-même, elle innove. Explorant des espaces hors normes et hors références, elle crée un nouveau type de matière (masse digitale), à partir de sources diverses et hétérogènes trouvées sur la toile, relatives à son sujet. A la manière d’un collage aux éléments découpés dans des journaux, dont Picasso et Braque furent les pionniers, ou de Jean Tinguely dont la matière première est constituée d’objets de récupération, Biliana elle aussi « récupère », puis construit et sculpte la masse digitale. Le fusionnement des éléments collectionnés, résultant en une matrice originale, qui à son tour est fusionnée ou partiellement fusionnée par elle-même, signifie que le lien visuel avec la réalité subsiste, même si au final l’objet créé est le lieu dit, mais que paradoxalement il ne l’est pas. Il a sa propre réalité.
Le travail de Biliana ne se situe pas, précise-t-elle, dans le résultat d’un « data » lié à la technologie, mais à une structure numérique liée au phénomène de la numérisation, qui existe indépendamment de toute technologie. C’est là que l’artiste trouve un espace pour s’exprimer, libre de toutes règles contraignantes. Elle définit son travail comme un « Time remapping », une sorte de nouvelle cartographie absurde, pour laquelle elle crée un nouveau type de matière et un nouveau langage, sans aucun lien avec la réalité, inspirés pourtant de la réalité. L’artiste essaie de créer une matière qui n’existe pas.
La démarche est innovante non seulement par le concept, mais également par le fait que le dossier informatique, constitué de plusieurs dizaines de couches d’informations représente une telle masse volumique, - que l’on peut qualifier d’« anti-matière » -, que les moyens mécaniques actuels ne permettent pas la réalisation des sculptures telles quelles, et que l’artiste est contrainte d’en réduire partiellement les données. Biliana porte donc son concept aux limites des possibilités actuelles. Les sculptures conçues pour l’exposition, au nombre d’une dizaine, sont en outre projetées en hologrammes 3D, en mouvement, et sont accompagnées de peintures digitales. Une exposition hors normes, une échappée hors limites à ne pas manquer !
Biliana K. Voden Aboutaam vit et travaille à Genève et New York. Diplômée de l’Académie Brera à Milan en 1999. Depuis 2000, expositions à New York, Venise, Nyon, Vienne, Marrakech, Sofia, prochainement à Rome et en Allemagne. A la galerie, série « La Bouche » présentée en 2005, « Les Baigneuses d’après Cézanne » en 2007, « The Homeric Cycle » en 2008, « Impossible Paysages » en 2011. Toutes les expositions sont assorties d’un catalogue.
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